Plan de Paysage sous marins des Calanques

Imaginer les paysages sous-marins des Calanques de demain

Le Parc national des Calanques est gestionnaire d’un territoire de 8 500 ha de cœur terrestre et 43 500 ha de cœur marin. Il s’est doté d’un Plan de paysage terrestre (Coloco, 2016) et c’est pour partager, échanger, faire évoluer la culture du paysage que le Parc national des Calanques poursuit aujourd’hui son plan de paysage sur la partie sous-marine de son périmètre : le Plan de paysage sous-marin fait référence à la dimension esthétique que constitue, d’une part, la qualité du décor et, d’autre part, les espèces habitant ce milieu que le plongeur peut apercevoir.

Les recherches sur la perception et la lecture du paysage sous l’eau sont balbutiantes, en raison du manque d’accessibilité, de visibilité mais aussi de diffusion de la connaissance, souvent trop technique ou scientifique. Le but de ce travail démarré en mars 2018 est donc de trouver une méthode de travail collaborative et partagée permettant d’assimiler, de combiner et de communiquer les savoirs de chacun pour les rendre accessibles à tous : élus locaux, techniciens, gestionnaires ou professionnels et visiteurs. Le plan de paysage identifie les processus anthropiques et naturels à l’œuvre et proposer des objectifs adaptés pour la protection de la valeur de ces paysages :

– Révéler les paysages à travers la surface de l’eau pour une meilleure appropriation et une meilleure compréhension des enjeux de préservation 

– Mieux appréhender l’empreinte de l’homme sur l’environnement marin pour mieux la contrôler

– Proposer une vision globale du fonctionnement des espaces marins du cœur du Parc national des Calanques et ses relations au territoire métropolitain élargi.

Proposer une exploration et une définition du « paysage sous-marin » 

– La notion d’horizon, fondatrice de la naissance du concept de paysage terrestre, est ici absente ou complétement différente. Lors des ateliers, l’accent a été mis sur l’opacité de la masse d’eau qui bouleverse logiquement et totalement la perception de ces paysages sous-marins par rapport aux paysages terrestres. Réflexion faite, cette opacité de l’épaisseur que le regard traverse et son aspect constamment changeant sont également présents à terre, mais nous n’y prenons plus garde. 

– Sous l’eau – c’est nos ateliers et nos visites qui nous l’ont mis en évidence – la dimension sonore est particulièrement présente, pour des raisons de propagation du son dans le milieu aquatique et de modification du sens de la vue. C’est un point important, mais une « définition des paysages sous-marins » ne pouvait pas se baser sur cela, par simple opposition aux paysages terrestres, car cette perception multi sensorielle existe évidemment à terre. Elle est simplement très souvent oubliée au profit d’une perception visuelle, picturale et esthétique seule. 

– L’accent a été mis sur l’inaccessibilité des paysages sous-marins profonds, et la nécessité d’un équipement spécial pour accéder aux moins profonds. A terre, tout le monde ne va pas partout non plus. Ce qui n’empêche pas aux habitants d’un territoire d’en avoir une vision globale, par la cartographie, les covisibilités et les récits. La cartographie des paysages sous-marins des Calanques était inexistante : nous l’avons créée. Les covisibilités sont rendues difficiles par la présence de la masse d’eau. Reste alors l’importance capitale des récits, d’une histoire partagée des paysages sous-marins, pour arriver à une prise de responsabilité commune. 

Projeter : protéger

Faire reconnaitre le bon fonctionnement écologique comme une ambition de projet de paysage sans exclure les humains des dynamiques en cours est, en soi, un défi. 

Les paysages sous-marins des Calanques sont un espace de process, de mécanismes, de dynamiques, plus qu’un lieu d’aménagement et d’opérations. Comment agir en interaction avec ce territoire sans projet, ce territoire non pensé, non conceptualisé, non aménagé, juste parfois brutalisé ? 

Face à ce constat, le plan de paysage n’a pas pour objet de fixer des points à aménager et d’autres points à désaménager. Le plan d’actions pour la protection et la valorisation des paysages sous-marins ne peut agir que par influences, par mise en défens, par isolement particulier de telle ou telle pratique. Arrêter d’agir, c’est une action de projet valeureuse qui peut être la plus structurante. C’est un projet de territoire par soustraction stratégiques et par guidage de l’évolution des pratiques des paysages qu’il faut proposer. « Prendre garde » – c’est-à-dire remarquer, faire attention, se mettre en position d’émerveillement – se confond alors avec le « prendre soin » – protéger, défendre, sauvegarder : take-care ! 

L’objectif n’est pas ici de trouver des sites-clés de projet, comme on peut le faire à terre pour appliquer et mettre en scène des principes vertueux d’aménagement du paysage afin d’illustrer une « bonne » stratégie. Ici, la complexité du jeu d’acteurs et l’ignorance relative qu’ils entretiennent entre eux rend cela impossible pour l’instant. 

Il s’agit plutôt de trouver – ensemble, collectivement, décidemment – des lieux où ne pas intervenir afin d’orchestrer un grand paysage heureux, à l’inverse d’une addition de décisions subies qui produit par défaut une réalité. 

Le paysage, un outil de mise en débat des perceptions et de la mise en commun des paysages

C’est en ce point que la démarche de plan de paysage sous-marin a révélé une facette importante de la profession de paysagiste, celui de mettre ensemble, autour d’une même table, d’une même carte, ou dans un même bateau (au sens propre), les acteurs extrêmement différents de l’évolution d’un territoire. 

C’est par cette prise de conscience urgente et partagée qu’une vision émerge. L’étude et la mise en débat des paysages sous-marins des Calanques révèlent le besoin vital, à l’échelle globale, de penser les territoires de demain de manière collective.

Catégorie

Exploration, Stratégie

Mission

Plan de Paysage sous-marin du Parc national des Calanques

Lieu

PN des Calanques (13)

Réalisation

2018-2019

Maître d'ouvrage

PN des Calanques (13)

Groupement

Coloco / Andromède Océanologie, Piano Paysage, Gilles Clément

Equipe Coloco

Miguel Georgieff, Fabien David, Margaux Bidat, Chloé Quintin